Oubliées de l'histoire, les… Fortifications de la Monarchie de Juillet (1830-1848)

Fort de Joux… il faut déjà se révéler un fin connaisseur du site pour déceler les éléments de fortifications de la période de la Monarchie de Juillet !
Fort de Joux… il faut déjà se révéler un fin connaisseur du site pour déceler les éléments de fortifications de la période de la Monarchie de Juillet !

Si le patrimoine fortifié fait, aujourd'hui, la part belle aux fortifications laissées par Vauban (seconde moitié du XVIIe s.) et Séré de Rivières (dernier quart du XIXe s.), les travaux réalisés entretemps le sont beaucoup moins !  Les premières ont fait l'objet de très nombreuses études et sont aujourd'hui assez bien connues alors que les publications de qualité, s'agissant des fortifications de l'Empire, de la Restauration, de la Monarchie de Juillet et, plus généralement, toutes celles qui précèdent le désastre de la guerre de 1870-71 restent exceptionnelles.

Plus encore, on oublie que durant les guerres de la Révolution et de l'Empire et Second Empires, la France a réorganisé à plusieurs reprises non seulement son armée mais aussi tout son glacis défensif, au premier chef, la défense de ses frontières. L’œuvre d’officiers tels que Chasseloup de Laubat et quelques autres durant l’Empire est passée sous silence : le renouveau de l’école de fortification française doit se lire en Italie (le fameux quadrilatère lombard) ou en Allemagne ! Il en va de même pour l’œuvre des officiers du génie de la Restauration au Second Empire qui reste dans l’ombre, excepté quelques contributions d’Haxo.

Période 1830-50 au Fort de Joux… reconstruction de la 5ème enceinte et établissement d'une terrasse d'artillerie sur le donjon, modifications de la 2e enceinte (nouveaux parapets avec créneaux de fusillade, escalier de sécurité…) — Retranchement du Chaffaud — Fort du Larmont inférieur !
Période 1830-50 au Fort de Joux… reconstruction de la 5ème enceinte et établissement d'une terrasse d'artillerie sur le donjon, modifications de la 2e enceinte (nouveaux parapets avec créneaux de fusillade, escalier de sécurité…) — Retranchement du Chaffaud — Fort du Larmont inférieur !

Commissions de défense de 1818 et de 1836.

Pourtant les Commissions de défense de 1818 et de 1836 élaborèrent de vastes programmes d’amélioration du système fortifié et des places-fortes : défense des côtes, fortifications des frontières, mais encore les fortifications de Lyon (1830 jusque vers 1860) puis de Paris (Enceinte de Thiers, 1841-1844)
Les travaux ont été réalisés localement par les chefferies du génie qui jouent un rôle important dans la conception et l’adaptation au terrain : on pourrait citer par mi quelques autres les généraux Rohault de Fleury (Lyon) ou Haxo. En effet, si le Comité des fortifications et l’École de l’Artillerie et du Génie veillent au maintien d’une certaine forme d’orthodoxie, la « sanctuarisation » du tracé bastionné, sur le terrain, on observe quand même une certaine liberté de manœuvre !

Fortifications de la Monarchie de Juillet… également très présentes au sein de la place de Briançon !
Fortifications de la Monarchie de Juillet… également très présentes au sein de la place de Briançon !

Une normalisation qui s'impose.

Les principes de fortification s’appuient toutefois sur un ensemble d’instructions qui présentent désormais un caractère normatif qui s’accentuera rapidement. On peut citer : les casemates d’artillerie à la Haxo (avis du Comité de 1819), le profil des parapets (instruction de 1830) et l’importance croissante donnée au défilement des ouvrages, les casernes voûtées à l’épreuve de la bombe (1843), les magasins à poudre (1848), la généralisation des casernes défensives, etc.

Dans leurs principes, les réalisations de la Monarchie de Juillet et celles qui leur succèdent jusqu’à la veille du conflit franco-prussien de 1870 restent résolument conservatrices en conservant le tracé bastionné, mais intègrent progressivement d’une manière subtile et avant tout rationnelle les progrès imposés par les progrès de l’art militaire, tout particulièrement ceux de l’artillerie.

Orientations bibliographiques.

• BALLIET J.M. Der französische Genieoffizier Chasseloup de Laubat und der Napoleonische Einfluss auf den Festungen in Norditalien (1796-1830). In : Ars militaris nach der Revolution, 2016, Festungsforschung vol. 8, p. 169-190, 269.
• BOYER P. Les fortifications de la Monarchie de Juillet à Briançon 1830-1850. Aix-en-Provence, Edisud, 2001.
• JADÉ P. Les tours et corps de garde de défense côtière de la Monarchie de Juillet au Second Empire. In : Battre le littoral, 2014, p. 33-47.
• PROST Ph. Les forteresses de l'Empire. Fortifications, villes de guerre et arsenaux napoléoniens. Paris, Editions du Moniteur, 1991.
• TRUTTMANN Lt-colonel Ph. Les derniers châteaux forts. Les prolongements de la fortification médiévale en France (1634-1914). Thionville, Gérard Klopp, 1993.

Sitologie, à propos du fort de Joux.

Forts de Joux, du Larmont inférieur et al. : une anthologie de la fortification française. 1re partie & 2e partie


Dr Balliet J.M., le 8 mars 2020


Commentaires

Inhapi a dit…
What do you think about Montmédy in this period?

I've certainly found markings "1830" in crenelated walls; Also some of the earth covered barracks usually ascribed to Séré de Rivières are already visible on cadastral plans before 1870.

Things like putting crenelated walls in some of the ditches and on top of the main curtain walls strongly suggest to me that these were built in the 1830'ies. The qualty of sonte as regard to prescision cutting of these walls is much higher than is usual at Montmedy.

But i have not found any official document referring to major work being done on the fortess in this period.



The works of the Monarchie de Juillet at Briancon are certainly impressive.
Balliet JM a dit…
You are, of course, largely right. Indeed, if modifications were made to the simple-body enclosure of Montmédy between 1815 and 1870, they remain little documented. We could however distinguish two periods. The first dates from the 1820s, more precisely from 1823, with the construction of an aqueduct from Bastion 7. The second corresponds to the continuation of work. They were made mainly in the 1830s, but also beyond. They essentially consist of a series of repair works which include the typical slots for this period. These works are attested by a series of chronograms on the rampart: "1829", "1830", "R 1928-1930", etc. On the other hand, the barracks are undoubtedly more modern, the “Séré de Rivières” period, even if they have the same footprint on the ground as older constructions.
All this work is certainly well documented in the "engineering archives" which were most probably preserved, but which I did not consult.
I hope I have answered your questions, otherwise feel free to reach me by email using the link on the blog. Our exchanges will certainly be easier.
Best regards.
Dr Balliet J.M.
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Vous êtes, bien évidemment, largement dans le vrai. En effet, si des modifications ont été apportées à l'enceinte à corps simple de Montmédy entre 1815 et 1870, elles restent peu documentées. On pourrait toutefois distinguer deux périodes. La première date des années 1820, plus exactement de 1823, avec la construction d'un aqueduc à partir du bastion 7. La seconde correspond à la poursuite des travaux. Ils ont été réalisés essentiellement dans les années 1830, mais également au-delà. Ils consistent essentiellement en une série de travaux de réfection qui incluent les créneaux typiques pour cette période. Ces travaux sont attestés par une série de chronogrammes sur le rempart : « 1829 », « 1830 », « R 1928-1930 », etc. Par contre, les casernes sont indubitablement plus modernes, la période « Séré de Rivières », même si elles présentent la même empreinte au sol que des constructions plus anciennes.
Tous ces travaux sont certainement bien documentés dans les « archives du génie » qui ont été très probablement conservées, mais que je n'ai pas consultées.
J'espère avoir répondu à vos questions sinon n'hésitez pas à me joindre par courriel au moyen du lien figurant sur le blog. Nos échanges seront certainement plus aisés.
Bien cordialement.
Dr Balliet J.M.