Des canons très particuliers sur les remparts de Saint-Malo : les canons de fer modèle 1778 de la fonderie d'Indret

Bastion de Hollande (Saint-Malo) — Alignement de pièces d'artillerie navale.


Avant-propos.

Si les promenades le long des remparts Saint-Malo sont très prisées, tant par les touristes que par les Malouins, on passe à côté de nombreuses pièces d’artillerie dont le caractère massif ne laisse pas indifférent. Pourtant, la nature même des pièces se révèle des plus intéressante, au moins pour l’amateur d’artillerie  !


Il s’agit d’un ensemble homogène de canons de marine en fer de la fin du 18e siècle fondus à Indret, près de Nantes. Disposé sur des affûts bien reconstitués, l’ensemble est assurément impressionnant en raison de sa qualité.

La fonderie d'Indret et la fonte de canons en fer suivant le procédé anglais.

La fonderie de canons d'Indret a été créée en 1777 par décision du ministre de la Marine Antoine de Sartine sur une île de la Loire, en aval de Nantes, afin de fondre des canons au profit la Marine royale française.

Le «  procédé des Anglois  »

En France, dans les années 1760 et 1770, les canons étaient coulés dans des hauts-fourneaux spécialisés à cet effet, comme ceux de Ruelle. Ces hauts-fourneaux consommaient des quantités importantes de charbon de bois. Fonctionnant pendant plusieurs mois sans interruption, ils devaient être arrêtés, parfois durant plusieurs mois, pour procéder à leur réfection. En Grande-Bretagne, en revanche, on utlisait depuis longtemps des fours à réverbère sensiblement plus performants et d'un usage plus souple.

Création de la manufacture de canons d'Indret.


En 1775, Marchant de la Houlière se rend en Angleterre pour étudier la fabrication du fer forgé en utilisant de la houille. Il observe dans l'usine de John Wilkinson la fabrication de canons en seconde fusion, en utilisant de la fonte au coke refondue au four à réverbère. Il se propose, dans un rapport au roi, de s'associer à William Wilkinson, frère cadet de John, pour monter une usine de ce type en France. En décembre de la même année, William Wilkinson est à Versailles et commence la construction de fourneau de démonstration près de Marly.


Bastion de Hollande (Saint-Malo) — Alignement de pièces d'artillerie navale.La proposition d'association formulée par Marchant de la Houlière n'est pas retenue ; par contre, le ministre de la Marine décide de s'entendre directement avec William Wilkinson. Un traité est signé le 11 mars 1777, prévoyant la construction d'une fonderie de canons sur l'île d'Indret. Wilkinson doit superviser les travaux dirigés par l'inspecteur des forges et manufactures de la marine, André Fougeroux de Secval l'ordonnateur de la marine à Nantes, de Sourdeval, et un ingénieur des bâtiments civils de la marine, Mangin. À la suite de dissensions avec Wilkinson, celui-ci est remplacé par Pierre Toufaire, ingénieur des bâtiments civils de la marine à Rochefort, qui arrive à Indret le 29 septembre 1777.

Les travaux commencent le 1er décembre et progressent rapidement : un fourneau est mis en service à titre d'essai ; il est utilisé pour couler un canon en février 1778. Une forerie temporaire mue par un manège est testée l'été suivant ; la forerie définitive, qui était actionnée par une roue hydraulique en fonte utilisant l'eau du bassin à marée, était terminée en janvier 1779. On établit entre la fonderie et la forerie une voie ferrée de 1100 m, faite de barreaux de fonte sur traverses en chêne, pour acheminer les canons ; c'est la première de ce genre en France. L'usine est donc dès 1779 en mesure de produire des canons.

Ce n’est finalement que le 15 août 1778 que de la Villhélio, commissaire de la marine à Nantes, a pu annoncer au ministre Sartine qu’il revenait d’Indret, qu’il y avait vu couler et forer un canon de 6 et qu’il était satisfait des opérations.

En mars 1780, Pierre Toufaire décrit les travaux comme pratiquement terminés et s'attelle à la rédaction d'une description de la fonderie.

English summary

If the walks along the ramparts of Saint-Malo are very popular,, we can't miss the many artillery pieces whose massive character does not leave indifferent. However, the very nature of the pieces turns out to be most interesting, at least for the artillery specialist!
It is a homogeneous collection of late 18th century french naval iron cannons cast in Indret, near Nantes. Arranged on well reconstituted carriages, the whole is undoubtedly impressive for its quality.

The Indret gun foundry was created in 1777 by decision of the Minister of Marine Antoine de Sartine in order to produce naval guns for the benefit of the French Navy until 1828.
In France, in the 1760s and 1770s, cannons were cast in specialized blast furnaces for this purpose, like those of Ruelle. These blast furnaces consumed significant quantities of charcoal; they operated for several months without interruption before being arrested for repair, sometimes for several months. Gun-founder in Great Britain, on the other hand, used significantly more efficient ovens.

In 1775, Marchant de la Houlière went to England to study the manufacture of wrought iron using coal. He observes the manufacture techniques of cannons in the factory of John Wilkinson using cast iron with coke. Reporting to the king, he proposes a joint venture with William Wilkinson, John's younger brother, to set up a factory of the same type in France. 
The association proposal met a refusal as, on the other hand, the Minister came to an agreement directly with William Wilkinson. 

An agreement was signed on March 11, 1777, providing for the construction of a gun foundry on the island of Indret, near the town of Nantes. Wilkinson should supervise the work under the direction of the inspector of the forges and factories of the navy, André Fougeroux de Secval. Following dissensions with Wilkinson, the later was replaced by Pierre Toufaire, a civilian navy engineer as soon as September 29, 1777.

It was not until August 15, 1778 that de la Villhélio, commissioner of the navy in Nantes, was able to announce to Minister Sartine that he was returning from Indret, and that he had seen the cast and drill of a 6  pounder naval iron gun, and that he was satisfied with the operations. In March 1780, the foundry reached near full operational status.

If, due to the circumstances, measurements could not be made, the weight in pounds allows to estimate that it must be pieces of naval artillery of a caliber of 18 pounds.

Artillerie navale — Canon de fer de 18 modèle 1778 de la fonderie d'Indret.

Si, en raison des circonstances, des mesures n'ont pu être réalisées, le poids en livres permet d'estimer qu'il doit s'agir de pièces d'artillerie navale d'un calibre de 18 livres.

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 139

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140


Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1785, n° 140

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 138

Canon de fer de 18 Mle 1778 fondu à Indret en 1786, n° 138


Orientations bibliographiques.

BOUDRIOT J. - Artillerie de mer. France 1650-1850. Nice, Ancre, 1992.

Fonderie d'Indret — Référence électronique

Paul Naegel, « Marchand de La Houlière et la création de la fonderie de canons d’Indret (1775-1778) », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest [En ligne], 115-4 | 2008, mis en ligne le 31 décembre 2010, consulté le 26 mars 2020. URL : http://journals.openedition.org/abpo/217 ; DOI : https://doi.org/10.4000/abpo.217

Un article publié sur Wikipedia se révèle également de très bonne facture : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fonderie_d%27Indret

Dr Balliet — 28 mars 2020





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