Les redoutes et fortins de la Forêt-Noire (17e et 18e s.) — Barocke Schanzen im Schwarzwald

Sternschanze Neuenweg — Fortin en étoile (Forêt-Noire). Cliché Balliet JM, 2018.

Contexte historique

À l’aune d’une série de conflits qui opposent, entre autres, le royaume de France et le Saint-Empire — Guerre de la ligue d’Augsbourg (1688-1697), de succession d’Espagne (1702-1714), de succession de Pologne (1733-1738), de succession d’Autriche (1741-1748) — l’Alsace et le pays de Bade, à peine séparés par un Rhin devenu, peu ou prou, frontière, accueillent de nombreuses troupes qui se font face.

À l’instar des lignes de redoutes disposées par les Français le long du Rhin, durant la guerre de succession d’Espagne et, plus encore durant la guerre de succession d’Autriche, le Saint-Empire n’est pas en reste. Des redoutes sont également construites, cette fois sur la rive droite du Rhin.

Toutefois, il en est d’autres, moins connues, qui sont installées en grand nombre (plus d’une centaine ont été répertoriées) sur les hauteurs de la Forêt-Noire, durant la guerre de la ligue d’Augsbourg [all. Pfälzischen Erbfolgekrieg] érigées durant l’hiver 1695-96 par Ludwig Wilhelm von Baden-Baden — le fameux « Türkenlouis » — pour contrôler les cols, routes et points de passage importants.

Certes, la dimension contenue de ces ouvrages ne leur confère qu’une valeur militaire des plus réduite. Tout au plus, étaient-elles en mesure d’empêcher ou de gêner quelques actions de reconnaissance. Il s’agit plutôt d’une série de postes d’observation.

Un cas d’école : Sternschanze et redoute de Neuenweg.

Le fortin en étoile (« Sternschanze ») et la redoute carrée du « Böllener Eck » à Neuenweg appartiennent à une ligne de défense avancée et comptent parmi les redoutes les plus anciennes*. Elles sont, aujourd’hui encore, parfaitement conservées !


Sternschanze Neuenweg — Fortin en étoile (Forêt-Noire). Cliché Balliet JM, 2018.

Le fortin a la forme d’une étoile à cinq branches d’un diamètre d’environ 30 m. Les parapets sont précédés d’un fossé de 2 à 3 m de profondeur. Enfin, on peut observer, malgré la taille très réduite, l’existence d’un semblant de chemin couvert.


Sternschanze Neuenweg — Fortin en étoile (Forêt-Noire). Cliché Balliet JM, 2018.

Sternschanze Neuenweg — Fortin en étoile (Forêt-Noire). Cliché Balliet JM, 2018.
Cette vue, prise au sol, permet d'apprécier le faible profil de l'ouvrage qui s'oppose, en quelque sorte,au tracé complexe en étoile !

Sur le flanc opposé du col est disposée une redoute d’une forme carrée, la plus classique dont chaque côté mesure environ 20 m. Son relief est aujourd’hui un peu moins marqué, probablement l’effet du temps et de l’érosion.

Sternschanze Neuenweg — Fortin en étoile et redoute (Forêt-Noire). Cliché Balliet JM, 2018.

Redoute carrée, Neuenweg. Cliché Balliet JM, 2018.

Entre les deux ouvrages, une sorte de ligne de communication avait été installée : il ne s’agissait pas d’une tranchée, mais d’un remblai formant parapet, lui-même précédé d’un fossé. Cette ligne probablement assez étendue est aujourd’hui encore bien visible entre les deux ouvrages et au sud de la redoute carrée. Par contre, au nord du fortin en étoile, elle se perd dans la forêt et n’est plus discernable.

Sternschanze et Redoute carrée, Neuenweg. LIDAR, Geoportal BW adapté par DR Balliet JM

Vue d'ensemble du dispositif défendant le col.

* Une épitaphe dédiée à Johann Marckloffsky von Zabrak est visible sur le côté est de l’église de Neuenweg. Il commandait ces redoutes l’année de son décès, 1691, contribue à la datation de ces ouvrages.

Ballade aérienne… Ma première étoile ?

Prises de vue aréiennes, durée 1 min. 52






Lexique allemand-français aux 17e et 18e s., quelques remarques.

Nous avons abordé de manière détaillée, dans un billet récent (cf. Mémento sur les redoutes installées le long du Rhin aux 17e et 18e — Fortifications : dispositions insolites ou méconnues (14)), la thématique de la fortification passagère du 18e en distinguant les redoutes (ouvrages défensifs dépourvus de flanquement) des fortins et des forts.

En langue allemande, on utilise de manière générique le terme de « Schanzen » qui correspond au concept plus global de « retranchement ». C’est aussi le cas en France, où on applique parfois le terme de redoute à une série d’ouvrages très différents. Ce n’est peut-être guère étonnant car, s’agissant de fortification passagère, les principaux utilisateurs n’étaient probablement pas plus au fait qu’aujourd’hui des différences entre les différents types d’ouvrages !

S’il fallait traduire en français « Sternschanze », le terme le plus adapté serait celui de fortin en étoile. Il existe également un synonyme « Sternwerk » qui correspond à un ouvrage en étoile alors que le terme de « Sternfort » est adapté pour des ouvrages en étoile d’une taille conséquente, justement des forts !


Quelques autres exemples de redoutes dans la Forêt Noire…

Technique : LIDAR — Source : Geoportal BW.

Kniebis (source LIDAR - Geoportal BW)
Kniebis (source LIDAR - Geoportal BW)

Breitnau (source LIDAR - Geoportal BW)
Breitnau (source LIDAR - Geoportal BW)
Sankt Märgen (source LIDAR - Geoportal BW)
Sankt Märgen (source LIDAR - Geoportal BW)

Orientation bibliographique.


  1. HAASIS-BERMER A., LAUBER J., SEIDEL U. - Die barocken Schanzen im Schwarzwald. Die Verteidigungsanlagen aud den Schwarzwaldhöhen. S.l., 2010. In : Festungsjournal - DGF, 2010, No. 37.
  2. HAASIS-BERNER A. - Schanzen im mittleren und südlichen Schwarzwald. S.l., 2014. In : Militärische Schichten der Kulturlandschaft, 2014, No. Alemannischen Instituts Nr. 81.
  3. STÖRK W. - Der Türkenlouis und seine schanzen. Verteidigungstechnik im SÜdschwarzwald. S.l., 2007. In : Festungsjournal - DGF, 2007, No. 30.
  4. STÖRK W. - Fortifikation im Barock - Die Schanzlinien des Türkenlouis im Südschwarzwald. S.l., 2010. In : Festungsjournal - DGF, 2010, No. 36.


Balliet J.M. 22 février 2018

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